Le résultat de l’élection présidentielle au Nigeria est attendu lundi, et de nombreux Nigérians redoutent des violences à l’annonce du vainqueur, bien que les opérations de vote se soient globalement déroulées dans le calme pendant le week-end.
L’élection est la plus serrée depuis le retour du pays à la démocratie en 1999. Elle oppose le président sortant Goodluck Jonathan, 57 ans, et son rival Muhammadu Buhari, 72 ans, candidat du Congrès progressiste (APC), qui rassemble une large partie de l’opposition.
Environ 69 millions d’électeurs – sur les 173 millions d’habitants du Nigeria – ont voté pour élire, outre le président, les 109 sénateurs et les 360 députés du pays le plus peuplé d’Afrique, premier producteur de pétrole et première puissance économique du continent.
Pour la première fois, les électeurs étaient identifiés par des lecteurs d’empreintes digitales, censés faire diminuer les fraudes qui ont entaché les scrutins précédents. La quasi-totalité des Nigérians ont voté samedi. Mais 348 bureaux, sur 150.000, ont dû rouvrir dimanche à cause de problèmes avec les machines biométriques ou de problèmes d’acheminement du matériel électoral, selon la Commission électorale nationale indépendante (Inec).
« Nous espérons pouvoir déclarer (les résultats) dans les 48 heures » suivant la fermeture des bureaux samedi soir, « et même avant », a affirmé dimanche le président de l’Inec Attahiru Jega.
Des violences sont redoutées à l’annonce des résultats, comme lors de la précédente présidentielle en 2011 où près d’un millier de personnes avaient été tuées.
De premiers incidents se sont produits dimanche à Port-Harcourt, la capitale de l’Etat de Rivers (sud), un Etat clé producteur de pétrole. Des milliers de partisans de l’APC ont manifesté pour dénoncer des fraudes et demander l’annulation des élections dans l’Etat, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Le chef local de l’APC, Dakuku Peterside, candidat au poste de gouverneur de l’Etat, a accusé l’Inec d’agir en connivence avec le PDP, le parti au pouvoir du président Jonathan, pour truquer les résultats, et il a réclamé un nouveau scrutin. Une accusation de fraude réfutée par le porte-parole local de l’Inec, Tonia Nwobi.
Attahiru Jega a promis qu’il examinerait toutes les plaintes, poursuivant son objectif de mener un scrutin « libre, juste et crédible, dans le calme ». « Nous demandons à tous les Nigérians de rester calmes en attendant les résultats », a-t-il dit.
A Kaduna, une grande ville du centre du Nigeria qui avait été submergée par les violences en 2011, « les gens ont peur », a confié à l’AFP une commerçante, Elizabeth Anthony. Dans cette cité où chrétiens et musulmans cohabitent, plusieurs centaines de chrétiens avaient été tués après que le candidat musulman, l’ex-général Muhammadu Buhari, qui réside à Kaduna, eut été déclaré perdant face au chrétien Goodluck Jonathan.
– Rejeter la violence –
Dimanche, alors que le dépouillement était en cours, les deux camps clamaient déjà sur les réseaux sociaux avoir remporté telle ou telle circonscription.
« Il ne doit y avoir aucune entourloupe », a prévenu Lai Mohammed, le porte-parole de l’APC.
Dans le nord-est du pays, où sévit la guérilla du groupe islamiste Boko Haram, l’armée nigériane a lancé dimanche des frappes aériennes et une opération terrestre contre des insurgés aux abords de la ville de Bauchi, selon une source militaire et des habitants. Dans la soirée, les autorités ont imposé un couvre-feu 24 heures sur 24 d’une durée illimitée à Bauchi et dans deux autres districts de l’Etat.
Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, avait promis de perturber le scrutin. Ses militants ont lancé plusieurs raids meurtriers, sans parvenir à empêcher les élections. Le groupe islamiste semble affaibli par l’offensive militaire internationale lancée contre lui depuis février, avec l’appui du Tchad notamment.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a félicité dimanche les Nigérians pour l’organisation d’élections qui se sont déroulées « largement dans le calme et de manière ordonnée » malgré les attaques de Boko Haram. M. Ban a appelé toutes les parties à continuer à rejeter la violence à l’annonce des résultats.