Le drapeau cubain a pris sa place lundi dans l’entrée du département d’Etat américain ainsi que sur la toute nouvelle ambassade cubaine à Washington, marquant le rétablissement historique des relations diplomatiques entre les deux pays après 54 ans de rupture.
A 00H01(04H01 GMT) les bâtiments qui abritent les sections d’intérêts dans chaque capitale ont retrouvé automatiquement leurs statuts d’ambassades, conséquence d’un accord annoncé le 30 juin et nouvelle étape concrète du rapprochement engagé l’an dernier par Barack Obama et Raul Castro.
Première image du jour, le drapeau cubain a été placé par des employés dans le hall d’entrée du département d’Etat à Washington, parmi les étendards des pays ayant des relations diplomatiques avec les Etats-Unis.
Quelques heures plus tard, à 14H30 GMT, le même drapeau tricolore a été hissé lors d’une cérémonie officielle sur la nouvelle ambassade cubaine à Washington, en présence du ministre des Affaires étrangères Bruno Rodriguez, la première visite dans le pays d’un chef de la diplomatie cubaine depuis 1959.
Une importante délégation cubaine était présente parmi les 500 invités, notamment le chanteur emblématique du régime Silvio Rodriguez, ainsi que la secrétaire d’Etat américaine adjointe chargée de l’Amérique latine, Roberta Jacobson, et le chef de la Section d’intérêts à La Havane, Jeffrey DeLaurentis.
Bruno Rodriguez a ensuite été reçu par son homologue John Kerry au département d’Etat. Les deux hommes se sont serré la main avec le sourire devant les caméras avant d’avant d’entamer une brève réunion pour évoquer les différents sujets relatifs au rapprochement entre les deux pays après plus de cinq décennies d’hostilité.
Le secrétaire d’Etat américain se rendra lui à Cuba le 14 août, notamment pour y hisser le drapeau américain sur la nouvelle ambassade des Etats-Unis. John Kerry devient ainsi le plus haut responsable américain à visiter l’île communiste depuis la normalisation des relations.
La dernière visite d’un secrétaire d’Etat remonte à 1945.
A La Havane, aucune cérémonie n’était prévue lundi, mais le bloc de béton et de verre du boulevard de front de mer Malecon sera bien transformé en ambassade américaine.
Lundi, «tous les employés de la section d’intérêts seront ré-accrédités comme employés de l’ambassade américaine, et le chef de mission comme chargé d’affaires. Cela signifie que tout le personnel sera incorporé dans le corps diplomatique de La Havane», a expliqué Bruno Rodriguez. La section d’intérêts américaine, la «Sina», emploie 360 personnes, en majorité cubaines.
– Congrès hostile –
Les relations diplomatiques étaient rompues depuis 1961 et ce fut seulement en 1977 que Jimmy Carter et Fidel Castro convinrent d’ouvrir des sections d’intérêts dans les anciens locaux des ambassades, pour des tâches principalement consulaires, sous la protection de la Suisse dans le cas des Américains à La Havane, et sous protection de la Tchécoslovaquie pour les Cubains à Washington jusqu’à la dissolution du pays, quand la Suisse a commencé à assurer le même rôle.
Mais la normalisation ne s’arrête pas là et les sujets de discorde sont nombreux à l’ordre du jour: la levée de l’embargo américain, la restitution de la base navale américaine de Guantanamo située à Cuba, les milliards de dollars d’indemnisation réclamés par les Américains expropriés de Cuba à la révolution, l’extradition des fugitifs réfugiés à Cuba et recherchés par la justice américaine…
Le Congrès américain doit nécessairement voter pour lever l’embargo imposé par John Fitzgerald Kennedy en 1962 et renforcé par la loi Helms-Burton de 1996, mais la majorité républicaine y est très hostile et les candidats à la présidentielle sont vent debout contre un rapprochement qu’ils assimilent à une récompense pour les frères Castro.
S’il était élu en novembre 2016, le candidat Marco Rubio, sénateur républicain d’origine cubaine, mettrait «fin aux relations diplomatiques avec la tyrannie communiste antiaméricaine jusqu’à une vraie ouverture démocratique à Cuba», a-t-il répété dimanche.
Le Sénat devrait dans l’immédiat bloquer la nomination d’un ambassadeur américain à Cuba, toute nomination présidentielle devant être confirmée par les sénateurs.
AFP