L’élection présidentielle du 6 novembre aux Etats-Unis porte sur une question qui intéresse le monde entier : les dirigeants américains ont-ils tiré les bonnes leçons de la crise de 2007-2008 ?
Partie de Wall Street, due à une folle déréglementation financière, cette crise s’est transformée en tragédie. L’économie américaine retrouve tout juste le chemin de la croissance. Rééquilibrage trop rarement mentionné : l’activité est, de plus en plus, tirée par les exportations. L’économie crée de nouveau des emplois. Le taux de chômage est un peu en dessous des 8 %. Il y a une petite lumière au bout du tunnel.
Le démocrate Barack Obama a été le gestionnaire prudent de cette timide guérison. Il sollicite un second mandat pour sortir son pays de la convalescence. Il n’affiche pas d’autres ambitions. Il n’a pas un slogan très mobilisateur. Il ne promet pas, comme il y a quatre ans, un changement majeur dans la manière d’être de l’Amérique. Il mène une campagne négative, s’attachant à démolir les prétentions de son adversaire.
En somme, M. Obama joue son bilan : pas toujours brillant, mais solide. Il a été l’artisan d’un interventionnisme modéré de l’Etat fédéral. Avec la législation Dodd-Frank, il a commencé à reréglementer la finance. Sa loi sur l’assurance-santé protège les plus démunis dans une Amérique dont la structure des inégalités est celle d’un pays du tiers-monde. Son plan de relance de l’économie a évité une récession pire encore. C’est le bilan d’un centriste sérieux.
M. Obama a observé la même prudence à l’étranger. Il a refermé la parenthèse de l’Irak et s’apprête à sortir d’Afghanistan. Il a manifesté la plus grande fermeté dans la lutte contre le terrorisme – comme en témoigne le raid contre Ben Laden. Il a été ouvert sur le « printemps arabe ». Il a géré avec sang-froid une relation difficile avec la Chine et la Russie. C’est l’action d’un réaliste qui n’a pas renoncé à tout idéalisme.
Mitt Romney défend une autre philosophie de l’Etat : le gouvernement, voilà l’ennemi, dit le candidat républicain. Il n’a tiré aucune leçon de la crise de 2008. Il veut démanteler la législation Dodd-Frank. Il ne jure que par un retour en arrière : baisse des impôts, dérégulation générale et hausse massive du budget du Pentagone. C’est la copie conforme du Ronald Reagan des années 1980. M. Romney se trompe de siècle.
Mais il le fait avec brio, promettant une relance étincelante à un pays d’humeur pessimiste. Même bagout sur le front extérieur, où il annonce un retour à une Amérique régnant en maître du monde. Voilà pour le Romney en phase avec un Parti républicain devenu fondamentaliste. Il y en a un autre, le Romney qui, en fin de campagne, s’est aligné sur des positions plus centristes pour séduire, avec succès, l’électorat indépendant. Qui faut-il croire ? Le fier-à-bras de l’été ou le modéré de l’automne ?
Le monde a besoin d’un président américain plus porté à la constance – façon Obama – qu’aux contorsions idéologiques – modèle Romney.