Dans l’entretien qu’elle a accordé à notre rédaction, Mme Sanassa Diané, Directrice générale de la Maison de la Presse, nous dresse le portrait de ce lieu devenu monument de la presse et aussi des problèmes qu’elle rencontre dans son travail. D’autres sujets ont été également abordés.
Mediaguinee : Madame, en juillet 2014, vous aurez passé 2 ans à la tête de la Maison de la Presse, quels changements, y avez-vous apporté ?
D’abord retenons que je suis la directrice de la Maison de la presse mais à sa tête il y a un Conseil d’Administration que préside depuis janvier Amadou Tham Camara. Ce CA décide des grandes orientations sur proposition de ses membres ou de la direction.
Alors dites-nous comment vous collaborez avec le Conseil d’Administration ?
Le Conseil d’Administration se réunit quatre fois l’an en session ordinaire. Il peut décider d’organiser des sessions extraordinaires. Le CA définit toutes les grandes lignes pour la gestion de la maison. La direction est chargée de mettre en pratique toutes ces grandes lignes qui ont été dégagées par le CA. Donc c’est une relation très forte. La direction et le CA doivent avoir la même vision sans interférence dans les prérogatives des uns dans les autres. Et c’est ce qui fort heureusement se passe et cela fait gagner en efficacité le personnel de la MDPG dans ses activités professionnelles et aussi d’épanouissement personnel.
Il existe aussi le Comité des Sages. 5 personnes choisies pour leur intégrité et leur bonne connaissance de la Presse. Ce comité veille sur la conformité des activités avec les textes qui régissent la MDPG.
Revenons aux changements apportés ? Par exemple récemment OSIWA vous a fait un don. A quoi a-t-il servi ?
En fait, c’est une subvention financière. Nous avons eu 36 mille dollars US. Cet argent a permis de créer le site Web www.mdpguinee.org, que vous pouvez visiter, la mise à disposition d’un studio radio, une salle de montage audio avec 10 ordinateurs connectés à Internet. La salle de montage fait face au studio radio. Ce qui veut dire que dès après les conférences de presse, les journalistes peuvent s’ils le désirent faire des interviews en studio puis faire leur montage. Ils traitent leur son et ils envoient via la connexion internet sans avoir à regagner leurs rédactions respectives. Des émissions peuvent aussi être réalisées dans ces studios.
Osiwa vient aussi en renfort pour les frais de connexion Internet à hauteur de 50% pendant une année.. Egalement, il est prévu qu’un des employés de la Maison de la Presse, et un membre du Conseil d’Administration et personnel aillent en visiter une maison de la presse de la sous-région pour voir comment on y travaille.
Il y a aussi le PNUD qui à travers Search For Common Ground nous appuie pour le Centre de Ressources documentaires qui dispose d’ouvrages portant sur la profession, des journaux nationaux mis à disposition gratuitement par certains organes de presse écrite, je citerai nommément le Lynx, qui nous fournit avec régularité ses parutions. Il y a a aussi un abonnement pour des titres de la presse étrangère. Ce centre va emmagasiner très bientôt des archives sonores et vidéo des conférences de presse. Il est dommage de ne pas avoir en archives tout ce qui s’est dit lors des milliers de conférences de presse organisées à la MDPG depuis 2010.
Dans un passé récent, les ambassades de la France et des Etats-Unis appuyaient la MDP. Continuent-elles ?
Sanassa Diané : Absolument ! L’ambassade de France n’est pas encore partie. Elle va être relayée par l’Union Européenne pour le budget de fonctionnement. Ce qui veut dire que la France est toujours là puisqu’elle est membre de l’UE. Il faut aussi rappeler que l’Ambassade de France a participé seule financièrement et techniquement à la naissance de la Maison.
Techniquement donc avec l’expert Média, Daniel Fra, premier directeur de la MDPG, directeur par intérim certes mais qui a posé les jalons avec bien entendu les associations de presse locale.
Nous avons le soutien de l’ambassade des Etats-Unis. Lors de la présidentielle de 2010 puis pour les élections législatives en offrant des équipements. Cette même ambassade des Etats-Unis promet le financement prochain d’un studio de télévision.
Madame, aujourd’hui beaucoup de journalistes se plaignent de la mauvaise qualité de la connexion internet. Est-ce qu’on peut connaitre c’est quoi réellement le problème ?
Là vous me donnez un scoop. Je pensais que ce problème de connexion était résolu. En fait, il est vrai, il y a encore quelques semaines, nous avons eu beaucoup de perturbations, beaucoup de problèmes de connexion. Nous avons donc pris contact avec notre fournisseur Orange avec laquelle d’ailleurs, nous avons noué un partenariat. Partenariat qui s’est concrétisé par une subvention d’une partie des frais de connexion et l’octroi de 10 ordinateurs. Nous sommes donc passés à 2 Mégabytes sur 2 Mégabytes pour améliorer la connexion. Mais voici ce qu’Orange nous a dit : « quelque soit le débit de votre connexion, s’il y a trop de téléchargements, ça ne marchera pas». La Direction a pris la mesure suivante : celle d’interdire les téléchargements pour un certain temps, d’interdire les téléchargements et l’utilisation de Facebook, même si Facebook ne consomme pas tellement et reste un outil de travail ne serait-ce que parce permettant d’échanger des info entre collègues. Mais imaginez que de 9h à 18h, un journaliste arrive, se met derrière un poste et sur Facebook, il va empêcher forcément ses collègues qui veulent travailler de le faire. Donc je pense qu’interdire Youtube, Facebook, les téléchargements, a amélioré la connexion ces derniers temps et permis au plus grand nombre de pouvoir travailler.
Le problème c’est aussi le wifi.
Encore une fois, Orange nous dit que s’il y a plusieurs postes connectés sur des sites qui demandent un bon débit, c’est sûr qu’il sera difficile que ça marche.
Un autre problème, c’est celui d’espace. Il y a plus de journalistes que d’espace disponible…
Je pense que vous êtes venu que pour me poser des problèmes (rire). Mais c’est un problème dont j’aime parler. C’est le leitmotiv du président du CA, des membres du CA, de la directrice que je suis. Ce problème d’espace constitue un réel blocage de nos activités. Parce que, si vous l’avez remarqué, la salle de conférence de presse est devenue étroite. Et souvent des journalistes sont obligés d’attendre dehors pour avoir le conférencier du jour et l’interviewer. Ou alors pour les grosses conférences, nous sommes sous la tente. Avec les grandes chaleurs enregistrées actuellement à Conakry, ce n’est pas l’idéal d’être sous la tente. Nous avons un petit studio radio. Nous attendons l’équipement pour qu’il soit fonctionnel. Il y a un petit centre de recherche documentaire avec des ouvrages où nous envisageons d’avoir des archives sonores et vidéo. Nous avons en projet un studio de télévision, un petit studio. Nous accueillons des formations avec une quinzaine de journalistes pour la plupart. Nous avons des ambitions, hélas ces ambitions vont se réaliser à une échelle moindre, faute d’espace. Nous voulons une maison fonctionnelle avec toutes les commodités pour rendre efficace et professionnelle, la presse guinéenne. Que faut-il faire : croiser les doigts en attendant d’avoir un lieu plus approprié ? Nous avons choisi de faire au mieux avec l’existant. Pour prouver que le résultat sera encore plus grand lorsque nous aurons une plus grande maison.
Lors d’une rencontre avec des responsables de médias, le président Alpha Condé a promis à la presse la construction d’une maison de journalistes digne de nom. Qu’en est-il ?
La Maison de la Presse, depuis qu’elle est créée, est locataire. Il est difficile de trouver dans un endroit aussi accessible un bâtiment plus grand à louer. Donc nous avons demandé à l’Etat, au Professeur Alpha Condé en personne, lorsqu’il a rencontré les associations de presse, de bien vouloir nous céder un terrain où une bâtisse sera construite comme cela s’est fait au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso. Le président de la République nous a promis qu’il allait le faire. Donc nous attendons impatiemment. Au Sénégal, c’est sur une corniche. J’imagine la même Maison chaque fois que je passe sur la corniche en allant à Boulbinet. Peut-être un jour …
Donc depuis ce temps il n’y a pas eu de suite favorable encore ?
Il n’y a pas eu encore de suite. Je crois que quand le président de la République vous dit que vous l’aurez, c’est déjà une suite favorable, mais…[elle n’achève pas la phrase]
Le concret n’est pas là encore…
Le concret n’est pas encore là, malheureusement. Nous allons encore vers les personnes autorisées qui peuvent rappeler notre doléance au chef de l’état pour cette cession de terrain ou de bâtiment. Peut-être que nous allons l’avoir. Je reste optimiste.
Une idée sur le montant des dépenses…
Ce que je peux vous dire, c’est que les recettes que nous mobilisons sont loin de pouvoir couvrir les dépenses. Très loin, très loin. Les recettes peuvent couvrir environ 10% des dépenses certaines fins de mois. Les fins de mois les plus heureuses !! Il faut retenir que la Maison de la Presse n’est pas une société commerciale, ce n’est pas pour faire de l’argent même si il faut en trouver pour assurer sa pérennité. Par exemple, le mois d’avril n’a pas été faste en recettes parce la Maison de la Presse a été constituée Centre de Communication contre Ebola. Une manière pour elle de s’impliquer dans la résolution des préoccupations nationales à l’image du Centre de Communication Electoral en 2010 puis en 2012. Toutes les conférences relatives à Ebola sont gratuites. Ce qui a permis à toutes les paries concernées de pouvoir communiquer. Une conférence débats a été organisée ici, le jour de la journée mondiale de la liberté de la presse avec le Ministère de la santé, les Ministres de la Communication et celui de la Jeunesse, le porte-parole du gouvernement et les présidents des associations de presse. Nous sommes sortis de notre corporatisme pour parler d’une actualité brûlante.
Entretien réalisé par BAH Alhassane
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