» Je vous ai vu à la télévision dire des mots que vous ne devriez pas dire si vraiment vous aimez notre pays. Vous avez souvent employé des expressions comme « l’opposition ne va pas exister, les opposants aboient » bref des discours de violence. »
A Monsieur Alpha Condé, Président de la République de Guinée, Chef de l’Etat.
Monsieur,
En ma qualité de citoyen guinéen, je me fais porte-parole des hommes, femmes et enfants de Guinée, pour vous exprimer notre cri de cœur. En effet, je viens vous interpeler sur le triste sort d’un de nos compatriotes en Angola, brûlé vif ! Son crime, avoir été commerçant dans ce pays sans titre de séjour à en croire le journal « kababachir.com ». Au-delà de cette ignominie, je voudrais attirer votre attention sur la gêne et la honte qui se lisent au jour le jour dans les yeux des citoyens guinéens à l’étranger comme à l’intérieur. De ce fait, voudrais-je humblement vous demander si les guinéens ne sont pas des êtres humains comme les autres? Avez-vous vu une autre nationalité subir de tel sort ailleurs? Il faut qu’on se fasse aussi respecter et valoriser comme tout le monde. Les guinéens sont maltraités et stigmatisés partout. En Europe par exemple, le permis de conduire de presque tous les pays passe sauf le nôtre. Nos diplômes sont sous-évalués à l’étranger. Aux Etats unis, ils se font abattre par la police pour un oui ou un non comme de vils poulets de la basse cour et c’est à peine que le gouvernement en parle. Nos frères et soeurs même dans la légalité ailleurs sont obligés parfois de se faire petits tels des cloportes. Un autre exemple, quand il y a crise dans les pays africains, seule la Guinée n’arrive pas à rapatrier ses ressortissants normalement. Et pourquoi ? Les guinéens subissent les autres du dehors comme un destin aveugle.
Revenant sur le cas de notre frère Mamadou Korka Diallo, je voudrais vous demander quel crime a-t-il commis pour être un bucher vivant ? La réponse certes vous ne l’avez pas et c’est pourquoi, je vous demanderais au nom des populations guinéennes, des mesures suivantes :
Primo, que le gouvernement guinéen convoque l’ambassadeur angolais à Conakry pour lui demander des comptes afin que lumière soir faite sur cette situation et par ricochet faire en sorte que les criminels soient sanctionnés légalement conformément aux lois angolaises et quant à l’ambassadeur guinéen, qu’il lui soit fortement instruit de veiller au bien-être de nos frères et sœurs partout sur le territoire angolais et;
Secundo, que les ministères de la coopération, des affaires étrangères et des guinéens de l’étranger se bougent pour sanctuariser (diplomatiquement et juridiquement voire plus) la vie de nos compatriotes où qu’il soient fussent-ils dans la clandestinité car la première fonction d’un Etat a toujours été d’assurer la sécurité extérieure (agressions de la part de groupes ou états concurrents) et la sécurité intérieure (sécurité physique des individus et des biens).
Monsieur le Président, je vous demande de personnellement vous investir dans ce sentier qui sans nul doute permettra de gargariser nos frères et sœurs de par le monde. Les membres de votre gouvernement et vos soutiens ne passeront pas outre vos consignes si vous décidez de prendre cette affaire à bras le corps.
Monsieur le Président de la République,
Les jeunes sont désorientés et de plus en plus révoltés et pour cause, l’emploi devient de plus en plus rare. La colère monte au sein des populations et la peur envahit petit à petit les populations que vous estimez aimer de tout votre cœur. Si vous n’apaisez pas les tensions, elles auront du mal à supporter les conséquences des positions de leurs dirigeants en plus des frustrations et autres violences quotidiennes dont elles sont déjà l’objet.
Monsieur le Président de la République,
Imaginez-vous la gène et la souffrance des femmes et des enfants de Guinée à l’étranger? Malheureusement, c’est ce qui se risque de continuer longtemps si vous ne réagissez pas. Et si cela advenait, il serait difficile d’empêcher de douter de cet amour pour votre pays que je prendrai comme un amour politicien.
Monsieur Condé, Président de la République,
Je vous ai vu à la télévision dire des mots que vous ne devriez pas dire si vraiment vous aimez notre pays. Vous avez souvent employé des expressions comme « l’opposition ne va pas exister, les opposants aboient » bref des discours de violence. Or si violence il y avait, vous ne pourrez pas ne pas emporter dans votre élan les femmes et les enfants de Guinée. Eh ! Oui ! Ce sont plutôt les femmes et les enfants que vous dites aimer que vous mettrez sur les routes et les pistes du fait de vos discours. Ils y seront, Monsieur le Président, à la quête d’endroits plus paisibles, avec tout ce que cela comporte comme désagréments et misères.
Monsieur le président de la République,
Il n’y a pas mille solutions à la crise sociale que nous traversons en ce moment ; la solution, c’est vous. Et au nom de toutes les populations guinéennes, je vous prie de calmer vos concitoyens en rassurant et en assumant. Monsieur le Président de la République ! Un gage de paix pour un pays démocratique comme le nôtre est l’organisation à bonnes dates d’élections crédibles et transparentes. Il y a beaucoup d’incertitudes en ce qui concerne l’organisation des prochaines élections en Guinée et de leur transparence. Et là aussi, vous avez un grand rôle à jouer. Je vous prie, Monsieur le Président de la République au nom du peuple de Guinée d’apaiser le pays en faisant en sorte que nous nous sentions à l’aise où que nous soyons.
Monsieur le Président de la République ,
Je crois aussi qu’au-delà des revendications des travailleurs qui a eu une issue salutaire pour le pays, il y a des sujets clés sur lesquels je vous prie d’apaiser l’opinion publique, Monsieur le Président de la République. Il s’agit surtout de la question de votre communication institutionnelle qui sans nul doute pourrait être mieux aboutie si votre entourage faisait correctement son travail ; un discours carré, univoque et millimétré attire beaucoup plus. Hélas c’est tout le contraire depuis quelques temps. Je vous prie, au nom des hommes, des femmes et des enfants de Guinée, d’apaiser le pays en prônant un discours rassembleur, synthétique et bien enrichi; en responsabilisant davantage chaque Ministre pour qu’il se concentre principalement sur les problèmes du département dont il a la charge, et en interdisant la confusion entre l’appareil étatique et votre parti politique, le RPG. Le peuple de Guinée ne veut plus jamais d’un parti-Etat. Je vous prie Monsieur le Président de la République, au nom de nos populations, d’apaiser le pays en faisant en sorte que les décisions de justice soient respectées et en donnant des instructions pour protéger la vie de tous vos compatriotes, quelles que soient leurs opinions. Oui ! Une voix discordante est gage d’une bonne démocratie. Ne l’étouffez pas. Le bruit court qu’il y aurait à la Présidence une liste de personnalités, fils et filles du pays, à écarter des affaires. Je vous prie, Monsieur Le Président de la République de nous rassurer que cette liste injuste n’existe pas. Souvenez-vous, un dirigeant magnanime est fort apprécié par son peuple surtout en période préélectorale. De ce fait, une grâce présidentielle pour le Commandant Alpha Oumar Boffa et ses camarades qui croupissent en prison depuis quelques années serait un geste fort abondant dans le sens de l’apaisement du pays. Le défunt Président Lansana Conté n’en a-t-il pas fait autant pour vous par le passé? Il est mieux d’être bon ! Dans ce même élan, l’amnistie des condamnés politiques comme Bah Oury serait également une plus-value dans la fabrique de notre démocratie.
Enfin, Monsieur le président de la République, le moment est venu d’entreprendre le dialogue inclusif appelé par toute la classe politique et les forces sociales sur les préoccupations actuelles du pays. En écoutant notre cri de cœur, et en prenant les décisions et attitudes que cela appelle, vous constaterez un grand pas dans le dégel de la crise actuelle. Ainsi, vous pourrez, à nouveau, dormir tranquille afin de coordonner avec plus de sérénité les nombreux chantiers dont l’achèvement dans les délais renforcera, à terme, votre bilan à la tête du pays. Les enfants de Guinée, fils et filles, par ma voix, vous prient, Monsieur le Président de la République, d’apaiser le pays en considérant nos différentes propositions et les autres contributions faites par des sages et compatriotes pour amener le calme dans notre pays et vous garantir une fin de mandat apaisée. Faites vôtre ce cri de cœur pour dissiper notre peur.
Patriotiquement vôtre!
Mohamed KOUYATE
Paris
kouyatemohamed@yahoo.fr